Accusés de contenir des produits dangereux, d’entraîner des maladies graves telle que la sclérose en plaque, de provoquer l’autisme ou d’être au centre d’un lobbying commercial organisé par les laboratoires pharmaceutiques, les vaccins n’ont pas toujours bonne presse. Qu’en est-il vraiment ?

Existe-t-il un risque de sclérose en plaques ?

En 1994, la France a lancé une grande campagne de vaccination contre l’hépatite B, ciblant les nourrissons et les adolescents. Le succès de cette campagne fut tel que que la France devint le premier pays du monde pour la couverture vaccinale avec presque la moitié de la population vaccinée.

Pourtant en juillet 1997, une étude sur les atteintes démyélinisantes du système nerveux central imputées au vaccin fut communiquée, lançant une véritable polémique et conduisant même le Ministre de la Santé de l’époque à suspendre la vaccination et à entretenir un climat de suspicion et de peur dans la population.

Les maladies démyélinisantes, c’est quoi ?

À la manière des câbles électriques, la plupart des fibres nerveuses de notre corps sont enveloppées d’une gaine isolante et protectrice de myéline. Les maladies dites démyélinisantes attaquent cette gaine, ce qui empêche la bonne circulation des signaux électriques le long des nerfs, et peut provoquer des lésions aux fibres nerveuses elles-mêmes, voire les détruire. C’est le cas de la Sclérose en plaques, mais aussi de la névrite optique et d’autres maladies du système nerveux central.

20 ans après la polémique, aucune donnée épidémiologique publiée n’étaye l’hypothèse d’un lien de cause à effet entre le vaccin contre l’hépatite B et les maladies dites démyélinisantes. Néanmoins, ceci n’est pas en contradiction avec l’hypothèse selon laquelle le vaccin pourrait éventuellement démasquer une atteinte latente chez quelques sujets génétiquement prédisposés. C’est pourquoi il est officiellement recommandé de rechercher les antécédents personnels et familiaux d’atteintes démyélinisantes de type sclérose en plaques. Lorsqu’ils sont repérés, l’avantage du vaccin doit être évalué de façon adaptée à chaque cas.

Pour rappel, l’hépatite B est une infection qui entraîne une inflammation du foie. Dans des cas assez rares, elle peut être fulminante, et présenter alors une évolution particulièrement rapide et grave. Mais c’est le risque de la voir évoluer vers une cirrhose ou un cancer du foie qui la rend dangereuse. D’autant plus qu’elle se transmet par le sang et les relations sexuelles non protégées. Or, on estime que plus de 200 000 Français sont porteurs d’une hépatite B chronique et que la plupart d’entre eux l’ignorent !

Les vaccins contiennent-ils du mercure, et celui-ci est-il dangereux ?

Certains vaccins sont fabriqués avec le thiomersal. Ce composé, qui contient du mercure, est utilisé pour prévenir la prolifération de bactéries et de champignons dans certains vaccins en cours de stockage. Après examen des données épidémiologiques et des interactions entre ce composé chimique et le corps humain, le Comité consultatif mondial de la sécurité vaccinale (OMS) a conclu qu’on ne dispose à l’heure actuelle d’aucune preuve de toxicité due au mercure chez le nourrisson, l’enfant ou l’adulte exposé au thiomersal présent dans les vaccins.

L’aluminium contenu dans les vaccins est-il nocif pour les nourrissons ?

Depuis bientôt un siècle, l’hydroxide d’aluminium est utilisé dans les vaccins pour sa capacité à stimuler le système immunitaire, et donc à garantir que l’organisme va bien mobiliser ses défenses pour développer une immunité à la maladie. L’aluminium vaccinal est donc un composant important.

Or, rien ne permet aujourd’hui d’établir sa nocivité. Entre 2014 et 2016, l’Agence Nationale pour la Sécurité du Médicament (ANSM) a financé des recherches en la matière. Si certaines études conduites sur des souris ont relevé des effets neurotoxiques de l’aluminium chez l’animal, les doses injectées aux souris étaient 24 fois supérieures à celles contenues dans un vaccin.

Pour Liliane Keros, immunologiste et virologue experte auprès de l’Organisation mondiale de la santé, la quantité d’aluminium contenue dans les vaccins est infime : “L’aluminium dans les vaccins représente une goutte d’eau. Avec tous les vaccins obligatoires, un bébé reçoit entre 4 et 5 milligrammes au total d’aluminium. Ce n’est rien.’

Dans le communiqué publié avec les résultats des recherches, l’ANSM a donc clairement conclu que “les vaccins contenant de l’aluminium sont sûrs.”

La notion- clé : le rapport bénéfice / risque

Il n’existe pas de certitude scientifique absolue à propos de la nocivité potentielle de l’aluminium vaccinal. Ce qui semble certain, c’est que si d’éventuels problèmes liés à son utilisation devaient exister, ils sont extrêmement rares. En revanche, le risque lié à la non-vaccination est double et bien réel.

 Au niveau individuel, on peut contracter une maladie infectieuse potentiellement mortelle. Ce risque est aujourd’hui faible en raison de la protection collective qu’offre une large couverture vaccinale.

→ Au niveau collectif, si le nombre de personnes non-vaccinées augmente, alors certaines maladies pourraient réapparaître, accroissant beaucoup le risque pour les individus non-immunisés de les attraper…

On considère donc que le bénéfice offert par l’utilisation de l’aluminium vaccinal est largement plus important que le risque potentiel — en rappelant de plus qu’en l’état actuel des connaissances, ce risque est nul.

Le vaccin contre la grippe saisonnière comporte-t-il des risques ?

Depuis la campagne de vaccination mondiale contre le grippe H1N1 en 2009 et ses victimes, le vaccin contre la grippe saisonnière est mis à mal. En effet, peu après ces campagnes massives de vaccination, plusieurs dizaines voire centaines de cas de narcolepsie ont été signalées à l’été 2010, en Finlande et en Suède.

Les experts ont noté qu’il s’agissait quasi exclusivement des personnes ayant été vaccinées contre la grippe A (H1N1) avec Pandemrix, seul vaccin utilisé dans ces pays durant la campagne de vaccination pandémique. Les autorités de santé européennes ont engagé une réévaluation du bénéfice/risque du vaccin Pandemrix : plusieurs études, dont une étude française, ont montré qu’il existait bien une augmentation du risque de narcolepsie.

En France, ce vaccin Pandemrix a été utilisé avec d’autres. En septembre 2013, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé a fait état de 61 cas de narcolepsie. Ainsi, l’amalgame est fait et chaque année, des personnes refusent de se faire vacciner contre la grippe saisonnière, dont le vaccin est différent.

Le système immunitaire des enfants est-il affaibli par les vaccins ?

Les détracteurs disent souvent que le système immunitaire des enfants est immature et que les vacciner sollicite trop leurs défenses. Loin de « fatiguer » le système immunitaire du nourrisson, les différentes études réalisées à ce sujet montrent au contraire que les enfants vaccinés ont de meilleures défenses que les enfants non vaccinés, y compris contre des infections sans lien avec les vaccins.

À l’inverse, les très jeunes enfants sont beaucoup plus vulnérables aux maladies contre lesquelles les vaccins protègent, comme la diphtérie, la coqueluche ou les méningites bactériennes. Toutes ces maladies, particulièrement contagieuses, peuvent frapper dès la naissance, y compris en cas d’allaitement prolongé. Là aussi, les études concluent que “retarder la vaccination expose à ces risques, sans bénéfice pour la santé de l’enfant“.

Alors en pratique, vaccin ou pas vaccin ?

Il serait certes inexact de dire que la vaccination constitue le seul moyen de prévention pour se prémunir de certaines maladies. En effet, cela va de pair avec l’action sur l’origine et la diffusion des agents infectieux, qui est primordiale quand cela est possible (via les conditions de vie, sanitaires et environnementales).

Il n’est pas exact non plus que la vaccination évite toujours et totalement la maladie. Le vaccin contre la grippe saisonnière n’est efficace qu’à 80 % en moyenne et 2 semaines après l’injection.

De même, comme tout traitement médical, les vaccins peuvent engendrer des effets secondaires. La plupart sont temporaires et bénins, mais il peut exister des effets secondaires graves, bien qu’extrêmement rares. Par exemple, les réactions allergiques provoquant des chocs anaphylactiques se produisent dans environ 3,5 à 10 cas pour 1 million de doses du vaccin ROR (rougeole, oreillons et rubéole) injectées, (OMS). La balance bénéfices/risques aboutit au consensus en faveur de l’intérêt de la vaccination dans la communauté scientifique.

Ainsi, même si la vaccination ne protège pas contre tout à 100%, l’Organisation Mondiale de la Santé estime qu’elle est une action de santé publique des plus efficaces et économiques.

Elle a permis d’éradiquer la variole, de réduire de 99  % à ce jour l’incidence mondiale de la poliomyélite, et de faire baisser de façon spectaculaire la morbidité, les incapacités et la mortalité dues à la diphtérie, au tétanos, à la coqueluche et à la rougeole. Pour la seule année 2003, on estime que la vaccination a évité plus de 2 millions de décès.

Les laboratoires pharmaceutiques ont-ils intérêt à pousser pour la vaccination ?

Un certain nombre d’affaires comme celle du Médiator ont provoqué une méfiance à l’égard des laboratoires pharmaceutiques, soupçonnés de défendre leurs intérêts commerciaux à tout prix. Ainsi, certains détracteurs des politiques de vaccination obligatoires pensent que les laboratoires se livrent à un lobbying intense en faveur de la vaccination afin d’augmenter les ventes des vaccins qu’ils commercialisent.

Mais à bien y regarder, cet argument n’est pas vraiment fondé. Car en l’absence de vaccination, les laboratoires verraient en contrepartie augmenter les ventes des traitements thérapeutiques contre les maladies prévenues par la vaccination, ainsi que les maladies connexes favorisées par certaines maladies infectieuses (cancers, infections chroniques, etc.). Or, ces traitements de long terme sont souvent plus coûteux que les vaccins eux-mêmes. D’un point de vue strictement financier, les laboratoires gagneraient donc à ce que la vaccination perde du terrain.

Tous nos articles sont rédigés avec l’aide de professionnels de santé de La Réunion.