Selon les recommandations officielles, il faut manger des produits de la mer deux fois par semaine. Pourtant, on entend souvent dire que les poissons sont pollués, et donc potentiellement dangereux pour la santé. Qui croire ? Explications.

Consommation de poisson : les recommandations

La consommation de poisson est recommandée deux fois par semaine. Dans l’idéal, il faut alterner la consommation de poissons gras (sardine, maquereau, hareng, saumon) et de poissons maigres (daurade, colin, cabillaud, sole).

Selon l’ANSES, les femmes enceintes, allaitantes et les enfants de moins de 30 mois ne doivent pas consommer d’espadon ni de marlin. Il leur est également recommandé de limiter la consommation des autres grands prédateurs pélagiques (thon, bonite, carangue) à 150gr par semaine pour les femmes enceintes ou allaitantes et 60gr pour les enfants de moins de 30 mois, soit une portion par semaine maximum.

Le poisson Réunionnais, j’en mange ou pas ?

En 2003, l’Agence Française de Sécurité Sanitaire a conduit une grande étude scientifique baptisée CALIPSO pour comparer les risques et les bienfaits du poisson dans notre alimentation. Objectif : faire la part des choses entre les qualités nutritionnelles reconnues des produits de la mer et leur toxicité potentielle. Résultat : le poisson est plutôt bon pour la santé.

Pollution, toxicité, métaux lourds : de quoi parle-t-on ?

Depuis plusieurs années, une inquiétude demeure quant au niveau de pollution grandissant de certains poissons. En effet, l’activité industrielle provoque l’écoulement de tonnes de produits chimiques dans les océans. Des produits parfois toxiques qu’on retrouve ensuite dans les poissons que nous mangeons.

Leur concentration a tendance à augmenter à mesure que l’on remonte la chaine alimentaire : en mangeant un petit poisson, le plus gros absorbe sa pollution, avant d’être lui-même mangé par un autre, encore plus gros, qui absorbe sa pollution… et ainsi de suite jusqu’à arriver aux grands prédateurs comme le marlin et l’espadon.

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1- L’ingestion de métaux lourds

Les métaux lourds comme le mercure ou le plomb (à la fois présent naturellement mais aussi par le biais des rejets industriels) se retrouvent dans les algues et les micro-organismes des fonds marins. Ils sont alors ingérés par les petits poissons qui s’en nourrissent, et remontent ainsi la chaîne alimentaire pour atterrir dans nos assiettes.

Car à chaque fois qu’un poisson en mange un autre, il absorbe le mercure qu’il contient. Il se charge donc de plus en plus en mercure, qu’il transmettra à son tour à ses prédateurs, et ainsi de suite jusqu’aux grands poissons pélagiques en haut de la pyramide alimentaire, comme le thon par exemple, qui présentent la plus haute concentration en polluants.

Qu’est ce que je risque ?

À haute dose, le mercure organique est toxique pour le système nerveux humain, en particulier durant son développement dans le ventre de la mère (même en l’absence de signes toxiques chez la mère) et au cours de la petite enfance. Cette substance peut provoquer des troubles du comportement légers et des retards de développement.

Comment éviter les métaux lourds dans mon assiette ?

Les quantités de produits toxiques présents dans les poissons sont infimes : dans l’immense majorité des cas, les produits visés présentent des concentrations inférieures aux seuils de dangerosité fixés par l’Organisation Mondiale de la Santé. Il n’y a donc pas de recommandation particulière pour le consommateur.

Seule exception, à prendre en compte à La Réunion, en raison de la quantité importante de mercures décelés dans les poissons prédateurs sauvages : une prudence particulière dans la consommation d’espadon, marlin, thon, daurade, etc.

  • Pour les enfants en bas âge (1 – 30 mois) : veiller à ce qu’ils ne consomment pas plus de 60 grammes de poissons prédateurs sauvages par semaine, en évitant la consommation d’espadons et de marlins en plus de leur consommation habituelle de poissons non prédateurs
  • Pour les femmes enceintes et allaitantes : veiller à ne pas consommer plus de 150 grammes de poissons prédateurs sauvages par semaine, en évitant, à titre de précaution, la consommation d’espadon et de marlin

2- L’intoxication à l’histamine

L’histamine est une molécule impliquée dans le système immunitaire présente dans tous les organismes vivants : sa présence n’est pas liée à la pollution environnementale. Lorsqu’elle est ingérée, elle peut provoquer des réactions ressemblant à une allergie. C’est ce que l’ont appelle une intoxication à l’histamine, aussi connue comme “syndrome de pseudo allergie alimentaire”. Elle est liée à la consommation d’aliments riches en histamine. C’est le cas du thon, du maquereau, de la bonite mais aussi de la sardine.

C’est la rupture dans la chaîne du froid qui va entraîner la formation d’histamine dans ces poissons.

Qu’est ce que je risque ?

L’histamine est responsable du syndrome de pseudo allergie alimentaire. Les signes se manifestent en quelques minutes ou au bout de quelques heures sous forme de boutons, de rougeur, de démangeaison, d’œdème du visage, de sensation de chaud.

Comment je l’évite ?

L’apparition d’histamine dans le poisson dépend de la température à laquelle il est conservé dès le moment de sa capture et jusqu’à sa consommation. Pour éviter l’intoxication à l’histamine, le respect de la chaîne du froid est essentiel. Ainsi, à La Réunion où l’on consomme beaucoup de thon en tartare notamment, un arrêté préfectoral exige que les restaurateurs aient une formation pour manipuler le thon.

À savoir : l’histamine n’est pas détruite par la cuisson, ni par le fumage ou la mise en conserve.

Entre 2010 et 2013, 11 % des intoxications alimentaires collectives à La Réunion étaient liées à une réaction à l’histamine.

3- La ciguatera

Encore une histoire de chaîne alimentaire ! La ciguatera est une intoxication alimentaire due à l’ingestion d’une toxine appelée ciguatoxine. Ici, les petits poissons mangent de minuscules algues toxiques avant d’être mangés par des poissons plus gros qui accumulent cette toxine. Lorsque l’homme consomme cette toxine en bout de chaîne, il peut contracter les symptômes de cette maladie. La ciguatera ne peut se contracter qu’à la consommation de poisson carnassier (mérou, barracuda, murène, carangue).

Qu’est ce que je risque ?

Les symptômes ne sont pas spécifiques à cette maladie et peuvent prendre différentes formes : picotement des extrémités, vomissements, diarrhée, grattelle, douleurs abdominales, fatigue, maux de tête, voire hallucinations sont les signes les plus courants (mais il y en a beaucoup d’autres). Ils apparaissent quelques minutes à 2 à 3 heures après l’ingestion et peuvent durer plusieurs jours (voire jusqu’à 3 semaines). Il est recommandé dans ces cas là d’aller voir son médecin traitant. Il vous prescrira antispasmodique, anti émétique et anti histaminique.

Comment je l’évite ?

En apparence, rien ne permet de distinguer un poisson suspect : son aspect, son goût et son odeur ne sont pas modifiés. De plus, ni la cuisson ni la congélation n’empêchent la toxicité. C’est donc un risque qui va de pair avec la consommation de poisson.

Entre 2010 et 2013, la ciguatera représentait 7 % des infections alimentaires collectives recensées à La Réunion. La ciguatera est plus fréquente dans les Antilles ou en Polynésie.

4- L’intoxication alimentaire suite à l’ingestion de chaire de requin

Les scientifiques qui se sont penchés sur la question ne sont pas d’accord quant au type de toxines contenues dans la chaire de requin. Certaines études penchent pour des ciguatoxines responsables de la ciguatera, d’autres études indiquent qu’il s’agit d’autres toxines, proches… mais pas tout à fait.

Qu’est ce que je risque ?

Les risques sont les mêmes que pour la ciguatera : des symptômes variés qui apparaissent quelques minutes à 3 heures après l’ingestion. Il est recommandé dans ces cas là d’aller voir son médecin traitant.

Comment je l’évite ?

Dans le doute, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) recommande de ne pas consommer de chaire de requin péché au large de La Réunion afin d’éviter tout risque de contamination.

Notez en outre que le requin étant en bout de chaîne alimentaire et souvent appelé “nettoyeur des mers”, sa chaire peut être aussi riche en métaux lourds, notamment en mercure.

Sources

Etude Calipso, bénéfices et risques d’une forte consommation de produits de la mer — ANSES

Consommation de poissons et exposition au méthylmercure — ANSES

Manger du poisson : pourquoi ? Comment  ? — ANSES

Avis relatif à la consommation des poissons prédateurs pélagiques, en particulier l’espadon, à la Réunion vis-à-vis du risque sanitaire lié au méthylmercure — Agence Française de Sécurité Sanitaire des Aliments

Avis relatif aux recommandations sur les bénéfices et les risques liés à la consommation de produits de la pêche dans le cadre de l’actualisation des repères nutritionnels du PNNS— ANSES

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Tous nos articles sont rédigés avec l’aide de professionnels de santé de La Réunion.